Les derniers Honoré et Bonello ont ceci de commun qu'ils citent, ou plutôt retravaillent, réaniment une mémoire cinéphilique. Chacun, à sa manière, joue de redites.
Mais si Honoré voudrait se fondre dans le patrimoine culturel qu'il invoque (Vivre sa vie, Les deux Anglaises et le continent), Bonello, lui, dénote. En rejouant Apocalypse now, eXistenZ, Tropical malady et Last days (et en les citant explicitement - ce qui n'est pas le cas d'Honoré, voleur à la petite semaine), le cinéaste cherche ce qui lui est propre, ce qui s'écarte, la dimension bâtarde et solitaire de sa lignée. Il prend le présent comme point de vue - tandis que Honoré se tient en regard des films passés.
Honoré a la folie du même - ressembler, copier maniaquement le travail des autres. Bonello se différencie, et, dans cette différence, distingue ce qui pourrait être pour lui une aventure de cinéma, un langage nouveau - unique.
Honoré use du connu pour être reconnu, Bonello défriche ce qu'il reste d'inconnu. C'est l'empaillement contre le meurtre.
"Chaque texte est unique dans sa différence, quoiqu'il soit traversé de répétitions et de stéréotypes, de codes culturels et symboliques."
Barthes, dans la Gazette de Lausanne, 6 février 1971.
Le beau film impur de Bonello a cette force, de venir prolonger le langage, d'inventer un langage à partir d'un langage déjà existant. Il travestit plus qu'il ne mime. Revoir Apocalypse Now ne met pas fin au charme de De la guerre. C'est, au contraire, l'occasion d'un dialogue entre les films - un champ s'ouvre entre les deux. Revoir Vivre sa vie, en revanche, signe l'arrêt de mort de La belle personne.
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