Mizoguchi est un cinéaste agité, qui nous fait croire au calme, à l'harmonie, à l'évidence. Il y a une telle paix dans ses plans qu'on pourrait penser qu'ils sont fixes. Au début abusé, j'ai fini par mieux voir : pas un plan sans un mouvement de caméra, mais tellement subtil (recadrage, basculement... jamais d'ostentation, jamais de travelling dénonçé par une musique, jamais de zoom dirigeant notre attention de manière trop volontaire), qu'on peut croire que tout se passe à la surface de l'écran.
Cette discrétion extrême, cette humilité dans le geste, cette épidermie de l'image, se répercute sur les récits. Les contes de la lune vague après la pluie n'échappe pas à cette constante : il s'agit encore, malgré un scénario aux tournures fantastiques, de personnages réduits à l'essentiel, accablés par l'économie, enfermés dans des rêves infiniment petits - le potier veut acheter pour sa femme une belle robe et rapporter du poisson séché pour le repas. Cette modestie du motif n'empêche en rien la folie, la menace, le danger. Le désir du potier est tellement étouffé que ce désir finit par subjuguer la réalité. Au moment de choisir une robe, l'homme rencontrera une ombre et se mariera à elle, sans se rendre compte qu'elle n'est qu'une ombre. Derrière cette ombre, un personnage tire les ficelles - une nourrice folle, puissante, seule survivante d'un massacre, agissant sur le monde jusqu'à le transformer. Et c'est en cela que Mizoguchi n'est pas un fataliste - car les personnages finissent par s'extraire de leurs rêves, qui les condamnent, qui les brûlent, et revenir à la terre. Certes la terre est leur condition première, mais ce n'est pas ça qui est important. L'important, c'est le réel - l'amour réel, la glaise des pots, le fils qui sent que son père est revenu. Le réel n'est pas une fatalité : c'est une matière.
Cette discrétion extrême, cette humilité dans le geste, cette épidermie de l'image, se répercute sur les récits. Les contes de la lune vague après la pluie n'échappe pas à cette constante : il s'agit encore, malgré un scénario aux tournures fantastiques, de personnages réduits à l'essentiel, accablés par l'économie, enfermés dans des rêves infiniment petits - le potier veut acheter pour sa femme une belle robe et rapporter du poisson séché pour le repas. Cette modestie du motif n'empêche en rien la folie, la menace, le danger. Le désir du potier est tellement étouffé que ce désir finit par subjuguer la réalité. Au moment de choisir une robe, l'homme rencontrera une ombre et se mariera à elle, sans se rendre compte qu'elle n'est qu'une ombre. Derrière cette ombre, un personnage tire les ficelles - une nourrice folle, puissante, seule survivante d'un massacre, agissant sur le monde jusqu'à le transformer. Et c'est en cela que Mizoguchi n'est pas un fataliste - car les personnages finissent par s'extraire de leurs rêves, qui les condamnent, qui les brûlent, et revenir à la terre. Certes la terre est leur condition première, mais ce n'est pas ça qui est important. L'important, c'est le réel - l'amour réel, la glaise des pots, le fils qui sent que son père est revenu. Le réel n'est pas une fatalité : c'est une matière.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire