vendredi 24 octobre 2008

Dernier Maquis - Rabah Ameur-Zaïmeche



Je me suis dit, pas mal. C'est un film rouge, c'est moins bien que Le désert rouge, mais c'est pas mal. Il y a de la couleur, il y a des gestes, il y a une attention aux gestes assez extraordinaire, il y a des ponts entre la dialectique et la contemplation (entre le narratif et l'esthétique), c'est plus abouti que Bled Number One, c'est un film pas mal. Mais.
Mais, j'ai eu le temps de me dire, pas mal. Un flux sans cesse interrompu. Je guettais les scènes, je pouvais les isoler, les désarticuler, ça ne changeait rien. Comme s'il manquait un montage. Pas un montage à l'intérieur des scènes, mais un montage des scènes entre elles. Autrement dit : le souffle. Le ton. Une idée de ce que pourrait être la voix du film. Son engorgement. C'est ça : Dernier Maquis ne parle pas. Les scènes s'empilent les unes sur les autres, comme les palettes rouges qui lui servent de décor. La fascination de Rabah Ameur-Zaïmeche pour le mécanique : voilà le problème pour moi. Rien de brisé. C'est un film qui empile. Un film d'usurier.
C'est que le cinéaste joue aussi le rôle du patron (Mao, passons sur cette lourdeur, elle n'a pas d'importance - ou du moins n'a-t-elle pas l'importance qu'elle se donne). Un patron de fiction, un censeur qui dit ce qu'il censure, un manipulateur qui donne toutes les clefs de sa manipulation. Le seul à jouer quelque chose de précis - le seul à avoir un jeu cérébral, une idée. Comme si Rabah Ameur-Zaïmeche sortait de sa propre tête.
Parfois, quelque chose de troublant s'esquisse. Le patron redevient cinéaste. Il se laisse surprendre par le jeu de ses acteurs, il les incite à continuer, ou bien les freine. Quelque chose là aurait pu se radicaliser. Le patron s'affirmer ouvertement comme metteur en scène de tout ce petit monde. Au lieu de ça, Rabah Ameur-Zaïmeche préfère ne pas toucher à l'illusion du jeu, à l'illusion de la fiction. Et son film empile les écrans rouges. On est passé à côté d'un possible grand trouble.

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