Le cinéma de Jean Epstein est celui de l’intuition qu’on doit suivre malgré tout. C’est un cinéma libérateur, passant par l’ivresse et la transe, et la déformation. Le délire maladif de Finnis Terrae, la tempête de Usher, le mariage au carousel de Cœur Fidèle : autant d’entraves à la perception d’une vérité déroutée. Les corps sont lents, très empesés, ce qui est rare dans le cinéma muet. Tout semble se passer au ralenti.
A un moment, tout revient, comme un sursaut, tout s’affole tristement, les personnages se rendent compte qu’il est trop tard, car Dieu, le Destin, l’Univers (ce qu’on voudra) a gagné. L’être est pris dans le grand rouleau. Exister, nous dit Epstein, c’est s’arracher, c’est échapper à toute figure imposée, c’est suivre une intuition qui ne cesse d’être altérée par la littéralité d’images planes aux rapports de force joués d’avance. Il ne reste plus à l’infirme de Cœur fidèle qu’à tracer un cœur à la craie sur un petit cabanon, pour que Jean sache que la voie est libre, et qu’il peut rejoindre Marie. Car ça ne se dit pas.
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