Premier film de Rohmer, premier conte moral, bizarrement moral,
franchement déviant.
C'est l'histoire d'un Américain à Paris, violoniste fainéant, réveillé
un matin par un télégramme lui annonçant qu'il touche un héritage. Une
fête s'ensuit, c'est l'été, on tire sur les réverbères, on parle
astrologie, et au matin tout le monde disparaît. Seulement, le
lendemain matin, l'Américain est déshérité. Vite, dans l'ignorance la
plus totale, il rejoint le rang des clochards.
Errances dans Paris déserte, soleil de plomb confinant à l'ivresse,
honte calamiteuse portée sur soi comme un boulet, signe après signe, le
clochard est repéré, la pauvreté se sent, se voit, se désigne aux yeux
des touristes qui font comme si de rien n'était.
Un moment, peut-être le plus beau du film : l'Américain ouvre
maladroitement une boîte de sardine et renverse de l'huile sur son seul
pantalon. C'est le point de bascule. Après cette tache, plus moyen
d'entrer dans un hôtel, plus moyen de se faire passer pour autre que ce
qu'on est. Le corps est pris dans les images d'une ville. Un corps vivant
au milieu des vieilles pierres.Ce sera ça, le cinéma de Rohmer. La dissolution des êtres dans des espaces qui les manipulent et les engloutissent parfois.
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