A quoi pourrait ressembler le cinéma Medvedkine
aujourd'hui? Il me semble que les réalisateurs se sont posé la question. Ou du
moins se sont-ils posé la question de comment décrire une situation politique
aujourd'hui, comment faire un film à la fois engagé et ouvert, et comment, en se
concentrant sur un microcosme et en un temps réduit (mais décisif), atteindre
une réflexion plus générale. Ils ont donc choisi un lieu : Corbeil-Essones, et
un moment : l'automne 2009, pendant les élections municipales, où Serge
Dassault, chef d'entreprise, milliardaire, momification ratée de Pompidou, et
maire sortant, ne sera pas réélu - il a été jugé inéligible -
mais tentera de placer un homme à sa place, Jean-Pierre Bechter, vague
épouvantail, contre le communiste Michel Nouaille.
Ce qui frappe immédiatement, quand on a en tête les films du collectif Medvedkine, c'est le statut de la parole aujourd'hui. Il semble, qu'en politique, elle soit devenue fragile, presque superflue. Une formule tout au plus, de temps à autres, mais personne n'y croit vraiment. Certains essaient (Nouaille à la fin, mais on ne l'entend pas, il est sifflé, hué, englouti), d'autres renoncent tout à fait (Bechter et Dassault, quasiment muets, par prudence ou par assurance, et aussi certainement à cause de leur diction aléatoire), et tout le monde ou presque renvoie les mots à leur statut de promesses. La parole a perdu de sa puissance. Elle n'est plus crue, signalée seulement comme premier symptôme de l'illusion d'une possible justice sociale. L'argent a gagné. Même la justice s'écroule. Dassault ne peut plus être maire, qu'à cela ne tienne : Bechter, son ami, prendra sa place, et fera tout ce que Dassault lui demandera de faire.
Dorine Brun et Julien Meunier saisissent très bien la confusion qu'une telle disparition génère. Il y a, dans leur film, peu d'interview, surtout des situations. Dassault n'est pas immédiatement désigné comme l'ennemi, ni Nouaille comme le héros. Quand les gens parlent, ce n'est pas face à la caméra, mais entre eux. Alors on voit ce qui circule, d'incompréhension, d'espoir, d'avidité, de moquerie. On voit les flics passer près d'un groupe de jeunes écoutant un écologiste, on voit Dassault manger des frites dans un snack et puis quelques jours plus tard on voit l'affiche de son candidat sur la porte du snack, on voit un homme sans étiquette s'effondrer au fur et à mesure des journées de tractage, on voit une ville complètement sinistrée : personne ne comprend plus rien à rien. L'impression est celle d'une friche sans projet. D'une intimidation qui a fonctionné. Corbeil-Essonnes est une ville qui ne peut plus penser.
Ce qui frappe immédiatement, quand on a en tête les films du collectif Medvedkine, c'est le statut de la parole aujourd'hui. Il semble, qu'en politique, elle soit devenue fragile, presque superflue. Une formule tout au plus, de temps à autres, mais personne n'y croit vraiment. Certains essaient (Nouaille à la fin, mais on ne l'entend pas, il est sifflé, hué, englouti), d'autres renoncent tout à fait (Bechter et Dassault, quasiment muets, par prudence ou par assurance, et aussi certainement à cause de leur diction aléatoire), et tout le monde ou presque renvoie les mots à leur statut de promesses. La parole a perdu de sa puissance. Elle n'est plus crue, signalée seulement comme premier symptôme de l'illusion d'une possible justice sociale. L'argent a gagné. Même la justice s'écroule. Dassault ne peut plus être maire, qu'à cela ne tienne : Bechter, son ami, prendra sa place, et fera tout ce que Dassault lui demandera de faire.
Dorine Brun et Julien Meunier saisissent très bien la confusion qu'une telle disparition génère. Il y a, dans leur film, peu d'interview, surtout des situations. Dassault n'est pas immédiatement désigné comme l'ennemi, ni Nouaille comme le héros. Quand les gens parlent, ce n'est pas face à la caméra, mais entre eux. Alors on voit ce qui circule, d'incompréhension, d'espoir, d'avidité, de moquerie. On voit les flics passer près d'un groupe de jeunes écoutant un écologiste, on voit Dassault manger des frites dans un snack et puis quelques jours plus tard on voit l'affiche de son candidat sur la porte du snack, on voit un homme sans étiquette s'effondrer au fur et à mesure des journées de tractage, on voit une ville complètement sinistrée : personne ne comprend plus rien à rien. L'impression est celle d'une friche sans projet. D'une intimidation qui a fonctionné. Corbeil-Essonnes est une ville qui ne peut plus penser.
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