Le Texas a bon dos. On projette volontiers sur ce
coin des Etats-Unis tout ce que le pays a de dysfonctionnel. Si bien qu'il est
devenu, au fil du temps, un réservoir fantasmatique, une bête noire, un lieu
pour les contes d'aujourd'hui. Killer Joe est un conte dont les protagonistes
sont tous des ogres. Des ogres ou des déchets, ou bien les deux. Friedkin n'y
va pas avec le dos de la cuillère. Son film enchaîne les séquences glauques
avec un certain art de la gradation, sans être une seconde tenté par le rachat
ou l'expiation. Ce qu'il veut montrer, ce à quoi il veut laisser libre cours,
c'est au pire. Et le pire advient, de scène en scène, tour à tour grotesque et
terrifiant, et parfois les deux en même temps ; le pire est mis en scène avec
passion, avec foi. On peut y croire comme lui ou on peut s'en lasser, là n'est
pas la question. Ce que Friedkin cherche, de toute façon, c'est la saturation.
Et on ne voit que ça : grimaces, sang, sexe, violence. A l’image de la
première séquence, parfaite, où Chris, arrivant de nuit dans le mobile-home de
son père, est confronté, non au visage de sa belle-mère, mais à sa chatte. Tout
le monde a la tête enfoncée dans l’effroi. Cap au pire.
4 commentaires:
Bonjour, après "Bug", W. Friedkin ne fait pas dans la dentelle. Personnellement, j'ai vu mais ne reverrai pas et je ne le conseillerai pas aux âmes sensibles. Bonne soirée.
C'est vrai que c'est un film dur. Mais j'aime beaucoup la façon dont Friedkin parvient à imposer l'obscène tout en contournant la censure.
C'est pourtant aussi un beau film. la première scène crée un climat de chaos en une symphonie de lumières et de sons. Il y a des moments très doux entre la frère et la sœur, et même entre Joe et la sœur, doux et étranges. Friedkin a souvent frappé fort ce n'est pas tant une surprise. Je trouve qu'il arrive à poursuivre ses obsessions favorites avec un matériau de base qui, comme vous le, soulignez, à beaucoup servi.
Oui, c'est vrai que cette première scène est assez grandiose. Une vraie entrée en matière qui porte le film en disposant dans le désordre tous les éléments qui seront déployés par la suite. Ce chien qui aboie, cette laisse tendue, cette pluie battante, ce face-à-chatte assez exubérant, la fragilité de la caravane...
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