L'adjectif "délicieux" duquel on parera le
film recouvre un certain nombre de questions auxquelles le cinéaste ne tient
pas à répondre (ou auxquelles il répond, mais de manière biaisée et ironique,
c'est-à-dire par le contournement ou la fuite). Parmi ces questions il y a :
qu'est-ce que c'est qu'une histoire d'aujourd'hui, qu'est-ce qu'un personnage,
qu'est-ce qu'un lieu, qu'est-ce qu'une intrigue, qu'est-ce que l'universalité,
qu'est-ce que la singularité ?
Finalement, le cinéaste ne semble s'être posé qu'une seule question : qu'est-ce que l'idiotie ? Il y répond par un plan magnifique où deux idiots face à un canapé vert dialoguent ainsi :
- Est-ce que ce canapé est bleu ?
- Ah bon, c'est un canapé ?
Quelques minutes plus tard, on verra l'un des deux idiots courir au sommet d'un petit bâtiment et s'extasier de la connaissance qu'il a des couleurs d'un arc-en-ciel soudainement apparu (il s'extasie non pas de voir, mais de comprendre et nommer ce qu'il voit, enfin, après des années d'ignorance pesantes).
Ces deux scènes à la fois très simples, efficaces et réjouissantes, ont bien quelques échos ou répercussions hilarantes (le savon du bonheur, l'amour à la cathare, les suicides ratés des étudiants de psychologie) mais tout cela reste au second plan. En fait, le film n'a l'air d'être fait que de seconds plans. Il n'y a rien au devant qui nous retienne. Il n'y a que de l'arrière-pensée, de l'arrière-fond, du second degré, de la réserve et du décalage (mais par rapport à quoi ce décalage intervient-il ? on peine à le discerner).
Damsels in distress se conforme passivement aux clichés sentimentaux du campus-movie - clichés que le cinéaste, n'assumant pas toujours la méchanceté éruptive de certaines scènes, s'efforce de sentimentaliser un peu mieux, au point d'errer parfois entre distance et empathie. S'il ne cesse d'annoncer une séquence dansée, il la réserve pour un générique écourté (et son inventivité se limite à une série de citations). S'il s'empare de la folie curieuse du personnage principal, il l'étouffe aussitôt. S'il prend soudain à coeur de conter les chassés-croisés de quelques filles et garçons, il annule très rapidement l'effet d'intrigue et de suspense que cela pourrait générer. Au final, le film est plutôt lâche, charmant mais par instants, charmant par agressivité, et renonçant aussitôt à son charme. On a l'impression que le cinéaste n'y est pas, que quelque chose là-dedans le dégoûte, et que même son dégoût le dégoûte. Ce qui est dommage, parce qu'il semble véritablement armé pour tordre le genre - Whit Stillman pourrait être une sorte de John Waters upper-class, au lieu de quoi il rêve d'être aussi bête que François Ozon, ou naïf comme Wes Anderson, et se complaît dans une somme d'indécisions.
Finalement, le cinéaste ne semble s'être posé qu'une seule question : qu'est-ce que l'idiotie ? Il y répond par un plan magnifique où deux idiots face à un canapé vert dialoguent ainsi :
- Est-ce que ce canapé est bleu ?
- Ah bon, c'est un canapé ?
Quelques minutes plus tard, on verra l'un des deux idiots courir au sommet d'un petit bâtiment et s'extasier de la connaissance qu'il a des couleurs d'un arc-en-ciel soudainement apparu (il s'extasie non pas de voir, mais de comprendre et nommer ce qu'il voit, enfin, après des années d'ignorance pesantes).
Ces deux scènes à la fois très simples, efficaces et réjouissantes, ont bien quelques échos ou répercussions hilarantes (le savon du bonheur, l'amour à la cathare, les suicides ratés des étudiants de psychologie) mais tout cela reste au second plan. En fait, le film n'a l'air d'être fait que de seconds plans. Il n'y a rien au devant qui nous retienne. Il n'y a que de l'arrière-pensée, de l'arrière-fond, du second degré, de la réserve et du décalage (mais par rapport à quoi ce décalage intervient-il ? on peine à le discerner).
Damsels in distress se conforme passivement aux clichés sentimentaux du campus-movie - clichés que le cinéaste, n'assumant pas toujours la méchanceté éruptive de certaines scènes, s'efforce de sentimentaliser un peu mieux, au point d'errer parfois entre distance et empathie. S'il ne cesse d'annoncer une séquence dansée, il la réserve pour un générique écourté (et son inventivité se limite à une série de citations). S'il s'empare de la folie curieuse du personnage principal, il l'étouffe aussitôt. S'il prend soudain à coeur de conter les chassés-croisés de quelques filles et garçons, il annule très rapidement l'effet d'intrigue et de suspense que cela pourrait générer. Au final, le film est plutôt lâche, charmant mais par instants, charmant par agressivité, et renonçant aussitôt à son charme. On a l'impression que le cinéaste n'y est pas, que quelque chose là-dedans le dégoûte, et que même son dégoût le dégoûte. Ce qui est dommage, parce qu'il semble véritablement armé pour tordre le genre - Whit Stillman pourrait être une sorte de John Waters upper-class, au lieu de quoi il rêve d'être aussi bête que François Ozon, ou naïf comme Wes Anderson, et se complaît dans une somme d'indécisions.
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