La folie. Une tête de femme (d'homme ? le genre est souvent indéterminé chez Odilon Redon) prise dans un triangle qui l'encogne, aiguisant, dirigeant et réduisant sa vision.
Les dessins les plus puissants à mon goût sont ceux où les yeux apparaissent - ce sont des dessins qui sont des visions, précisément, littéralement, parce qu'ils ont des yeux pour voir - et souvent ces yeux nous voient. Nous devenons nous-mêmes visions de ces visions. Le fantastique, le monstrueux, se situent là, dans cette réflexivité, dans ce détournement du 'voir'.
L'humour de ces squelettes déhanchés ou de ces araignées qui viennent de faire une mauvaise blague et en préparent déjà une autre, n'atténue pas l'effroi. L'humour est celui de figures qui se rient de nous, consolidant leur hiératisme.
La nuit (1886), 6 planches. 6 planches d'un monde arrêté. Le dessin est ici comme une suspension du temps, dessinant un monde par une succession d'arrêts. Pour Odilon Redon, c'est le début des séries-poèmes, où un vers accompagne chaque dessin. La suite des dessins forme une phrase, un monde, une intelligence du visible par le lisible.
Les dessins les plus puissants à mon goût sont ceux où les yeux apparaissent - ce sont des dessins qui sont des visions, précisément, littéralement, parce qu'ils ont des yeux pour voir - et souvent ces yeux nous voient. Nous devenons nous-mêmes visions de ces visions. Le fantastique, le monstrueux, se situent là, dans cette réflexivité, dans ce détournement du 'voir'.
L'humour de ces squelettes déhanchés ou de ces araignées qui viennent de faire une mauvaise blague et en préparent déjà une autre, n'atténue pas l'effroi. L'humour est celui de figures qui se rient de nous, consolidant leur hiératisme.
La nuit (1886), 6 planches. 6 planches d'un monde arrêté. Le dessin est ici comme une suspension du temps, dessinant un monde par une succession d'arrêts. Pour Odilon Redon, c'est le début des séries-poèmes, où un vers accompagne chaque dessin. La suite des dessins forme une phrase, un monde, une intelligence du visible par le lisible.
Béatrice (1897). Lithographie tricolore.
C'est le début, non d'un travail sur la couleur, déjà amorcé, mais d'un abandon du noir et blanc. Et avec le noir et blanc, ce qui se perd, c'est le regard. Les figures ne font plus face, elles montrent leur profil, elles n'ont presque pas d'yeux, elles semblent disparaître. Le visible, dans le spectre intégral de la lumière, se fait plus rare et plus fragile.
C'est le début, non d'un travail sur la couleur, déjà amorcé, mais d'un abandon du noir et blanc. Et avec le noir et blanc, ce qui se perd, c'est le regard. Les figures ne font plus face, elles montrent leur profil, elles n'ont presque pas d'yeux, elles semblent disparaître. Le visible, dans le spectre intégral de la lumière, se fait plus rare et plus fragile.
Le Christ du Silence, par exemple, avec ses couleurs flamboyantes, marque ce qui apparaît d'abord comme une contradiction entre les jaunes, verts et bleus flamboyants, et cette main portée devant la bouche et ces yeux fermés. Il ne s'agit plus de vision, en tout cas pas de la même façon que dans les dessins de la période noir et blanc d'Odilon Redon. On pourrait parler plutôt de pré-vision (avant que les yeux ne s'ouvrent et ne fassent disparaître ces couleurs). La couleur semble précéder le visible - la couleur est la naissance du visible, le bain cosmique où se forment les figures.
Mais Odilon Redon n'abandonne pas tout à fait le noir. Dans la salle des bouquets, à la presque fin de l'exposition, les boutons des fleurs nous fixent comme plus tôt les monstres. Et de cette peinture ornementale se dégage une impression de grand malaise, de grand trouble.
Mais Odilon Redon n'abandonne pas tout à fait le noir. Dans la salle des bouquets, à la presque fin de l'exposition, les boutons des fleurs nous fixent comme plus tôt les monstres. Et de cette peinture ornementale se dégage une impression de grand malaise, de grand trouble.
2 commentaires:
Pas d'accord avec votre interprétation de la Folie : c'est à mon avis le contraire que veut signifier Odilon Redon : la folie est clairvoyance, aiguise la vision... C'est d'ailleurs pour ça que TOUS les poètes et écrivains s'y intéressent et qu'Antonin Arthaud en est la figure de proue...Cordialement...
Ah mais je suis entièrement d'accord avec vous. Elle aiguise oui, réduit le champ de l'investigation, mais pour mieux voir, mieux diriger le regard.
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