lundi 10 février 2014

Zero Dark Thirty, Kathryn Bigelow




Zero Dark Thirty est un film cathartique cancéreux, complètement malade, bouffé jusqu'à l'os aussi bien par les idéologies dénoncées que par celles acquises. Techniquement parfait, le film construit indubitablement une esthétique (la fin dans la forteresse de Ben Laden est sidérante : des plans qui tendent vers l'écran noir, d'autres passés aux filtres verts et au sein desquels les personnages ont des rayons lasers qui leur sortent du crâne). Mais qu'est-ce qu'il raconte ? Que l'amitié et la patrie, c'est peut-être plus important encore que la foi ?
Et que dire, ici, des scènes de torture ? Elles sont hallucinantes de cruauté, presque insoutenables. Au service de quoi ? De quelques larmes versées par une jolie rousse au cœur de pierre, exilée tel Ulysse en terrain muslim mais sans Pénélope pour l'attendre ?
Dans sa manière de mêler l'intime (très parcimonieusement : à vrai dire Bigelow ne parle de l'intime que pour déplorer le fait qu'il n'existe pas) et le politique, la cinéaste atteint un degré de confusion ahurissant. Elle semble n'envisager la conscience que comme deuil, pitié, ou retranchement. Pourtant, on voit chez elle ce qu'on ne voit nulle part ailleurs : la lisibilité de l'action. Dommage que, derrière cela, la pensée ait une gueule de gros flan du Texas.

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