mercredi 12 novembre 2008

La vengeance dans la peau - The Bourne Ultimatum - Paul Greengrass



La vengeance dans la peau m'a posé un léger problème : pourquoi les deux grands méchants du film ont-ils des prénoms juifs (Ezra et Noah) ? Le propos politique du film (ouvrir les yeux sur une manipulation de la société par des institutions d'état) se teinte ainsi d'une note antisémite suspecte (pas vraiment affirmée, mais quand même présente).
Au bénéfice du doute, on dira quand même que le film de Paul Greengrass est excellent. Parce qu'il ne refuse ni l'esthétique ni le métaphysique. Les films d'action sont parfois porteurs de réflexions radicales sur l'être et de la mise en image de ces réflexions (voir le sublime Traqué de Friedkin). Dans La vengeance dans la peau, il est ainsi question de la disparition: comment disparaître? comment, alors qu'on est une cible, se fondre dans la foule? comment faire un avec le corps social alors que notre identité à elle seule constitue une menace pour ce corps social? La scène de la gare de Londres est en ce sens exemplaire. Extrêmement rythmée, tendue, on y voit Jason Bourne donner des indications à un journaliste lui-même menacé. Les phrases sont courtes, précises : ne sors pas, fais tes lacets, avance, marche plus lentement. Et l'oeil du spectateur, soit cherche cet homme, soit cherche ceux qui le menacent. Si le journaliste obéit point par point aux conseils de Jason Bourne, passé maître dans l'art de la disparition (identité égarée, mémoire vacante, être zéro), il survit. Le suspense est alors de savoir s'il obéira jusqu'au bout, ou s'il faillira. Peut-on ne pas exister? Dans une société sur-fliquée, comment ne pas apparaître? De leur côté, les traqueurs sont dans leur bureau, et cherchent à obtenir ce qu'ils appellent des "visuels". Voir,c'est pouvoir. Etre vu, c'est donc être en danger. Et le film poursuit cette démarche esthétique à Tanger, dans une scène de course-poursuite au ralenti, dans une foule. Il invente la lenteur- la lenteur comme arme d'assimilation à la masse.

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