jeudi 5 août 2010

The house - A casa - Sharunas Bartas




Un film en forme de portrait chinois - si tu étais une maison, qui t'habiterait ? - formellement splendide, quelque part entre Andy Warhol, Annie Leibowitz et Jan Saudek. Le problème, par rapport à Saudek et Leibowitz, c'est qu'ici on a quelqu'un qui regarde, un intermédiaire évacuant les questions que de telles images pourraient nous poser, absorbant leur violence et leur sensualité. Tout se passe comme si Bartas n'avait pas assez cru à cette histoire de maison-monde, infiltrant dans ses visions un personnage sans nécessité, jouant constamment l'incrédulité, le désarroi ou l'hallucination, et minimisant ainsi les dimensions dédalesque et psychédélique sans fluo qui font la force du film. On ne peut pas se perdre dans The house, car un acteur joue cette perte pour nous. C'est cette dimension de découverte d'un monde à laquelle je ne crois pas du tout, car tout pourrait être là depuis des siècles et nous sauter au visage sans prévenir (vivre un peu plus, en fait, et moins poser).
Il y a aussi un tic dont je ne sais pas trop quoi penser : le moment musical à l'exact milieu du film, comme dans (tous?) les autres films de Bartas. Est-ce que c'est un repère temporel pour le spectateur, un point de rupture, un entracte, une trouée, ou bien est-ce que c'est parce que le matériau échappe au cinéaste (Saudek est quand même très présent) et qu'il cherche par tous les moyens à poser son empreinte ? Autre impression : ces moments musicaux sont comme des creux dans le film, comme si le film se repliait sur eux, et perdait de sa linéarité pour devenir rond, contenant - le film devient alors comme une boîte à musique, un coffre avec à l'intérieur quelque chose de très précieux et très rare, presque inaudible mais là. En écho, cette presque dernière phrase du film (le film est cerné par deux monologues) : "nous n'allons pas disparaître" - Bartas fabrique-t-il des capsules de survie à usage des gens qu'il aime ?
Enfin, que dire de Carax, Descas et Bruni-Tedeschi ? Si Carax s'amuse, son personnage n'est pas le plus passionnant. Quant aux deux autres, ils semblent s'ennuyer à mourir. Il faut dire que Valeria Bruni-Tedeschi n'avait jamais joué dans un film aussi sale (dans des films à partouzes, oui, mais toujours hygiéniques). Qu'est-ce qu'elle fait là ? La réponse est au début du film : Paulo Branco - le nom apparaît aussi gros que celui de Bartas - a produit le film (et, comme d'habitude, ankylosé un cinéma qui n'avait pas besoin de lui).





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