Los est un portrait de Los Angeles. Sans les anges, donc. Pour que résonne, peut-être, Olvivados comme possible. Pour parler du Mexique, en tout cas, en creux. Los, enfin, parce que c’est la question du nombre que James Benning aborde ici, dans ce film moins méditatif et moins abstrait que ceux que j’ai vus précédemment.
Une allée d’arbres où circulent les joggeurs, une route bordée de sable : les plans marchent ainsi, rhétoriquement, par la contradiction. Un homme qui tond sa pelouse, une forêt qui brûle. Et dans le port industriel, une otarie : ce monde-là, investi par les hommes, est habité depuis longtemps. Benning nous montre les traces d’une colonisation. D’un exploit aussi, suivant l’angle sous lequel on le regarde. Mais un exploit lié à tant de données extérieures au lieu (l’eau, par exemple, détournée, puisée à l’extrême), que la ville semble fragile, toujours menacée. Los Angeles ne cesse d’être une conquête – elle le fut pour les premiers colons, elle l’est encore aujourd’hui, pour subvenir aux besoins du nombre.
C’est quelque chose qui m’avait marqué quand j’avais voyagé dans l’Ouest américain : d’immenses villes entourées d’une nature hostile et non maîtrisable, tels les ours de Denver ou les coyotes de San Francisco. Les villes sont des rassemblements nécessaires – sans le nombre, il serait impossible de vivre ici (d’y vivre, disons, à l’occidentale). C’est tout le contraire des villes des Etats européens, dans lesquelles le nombre ne cesse d’être un problème. Ici, à Los Angeles, le nombre est une loi et une nécessité.
De la régularité des plans, 2 minutes 30 chacun, naît une interrogation : qu’est-ce qui fait qu’on trouve certains plus longs que d’autres ? De quels temps différents sommes-nous constitués ? Pourquoi notre regard habite-t-il plus ce plan par la pensée, et cet autre par la rêverie ? Celui-ci par l’émotion, celui-là par le repérage ?
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