jeudi 11 mars 2010

How much wood would a wooodchuck chuck - Werner Herzog


Un extrait ici, pour un aperçu de ce dont il s'agit, difficilement descpritible :
http://www.youtube.com/watch?v=sMJ4thppCkk

La force du film est de nous imposer cette litanie pendant toute sa durée. Nous assistons au championnat du monde des Auctioneers (je ne trouve pas de mot français pour ça : commissaire-priseur ?), dans une salle comble, où défilent une trentaine de candidats et quelques vaches qui semblent ne servir que de décor (puisqu'on ne vend rien et que tout est simulé, même les enchères). On commence par ne rien comprendre aux règles, à ce qui différencie un candidat d'un autre, à ce qui permet de les évaluer. On se sent comme immergé dans une peuplade aux rituels inintelligibles. C'est là souvent le cinéma d'Herzog : le spectateur est un extraterrestre, et traité comme tel. Et puis, peu à peu, au lieu d'entendre une seule langue étrange, trop rapide, bizarrement articulée, composée essentiellement de chiffres, on en entend plusieurs. On se rend compte que chacun des candidats a sa langue, sa façon d'aborder l'auctionneering. On finit par préférer un candidat à un autre. On se retrouve naturalisé.
Ce film en contient deux autres de son auteur : Huie's predict, autre documentaire américain sur le langage, où nous assistons au sermon et à la transe du pasteur Huie, qui pourtant ne professe que des banalités. C'est un temps d'immersion dans un langage d'un genre étrange, religieux certes, mais pas plus sectaire que le langage économique des Auctioneers. Poétique en un sens exclusif. Mais il y a aussi, dans How much wood would a wouldchuck chuck, un portrait, celui du vainqueur, baigné par la grâce, qui fait penser à celui que Herzog avait fait du sauteur à ski Steiner dans La grande extase. Mêmes traits juvéniles, même façon de s'illuminer à l'évocation de la victoire, comme si le langage était devenu hormonal, et l'existence électrique.

Ce qui m'impressionne, à mesure que j'avance dans la découverte du cinéma de Werner Herzog, c'est la cohérence de sa filmographie. Si certains de ses films paraissent un peu vite conçus, si on peut leur trouver mille défauts, ils semblent tous être les pièces d'un gigantesque puzzle. Certains morceaux sont plus éclairants que d'autres, certains tardent à trouver leur place, certains ressortent et semblent si beaux qu'on pourrait les isoler, mais ils sont tous les fragments d'une quête que je crois être ininterrompue.

2 commentaires:

w. a dit…

fantastique !!! C'est carrément tribal; du chant folklo-économique ? j'adore. Je vais récupérer la bande son de l'extrait, merci !
> Très envie de voir ce film !

asketoner a dit…

c'est un truc assez dingue, oui.
sophie riestelhueber avait fait une installation en utilisant ça, où elle mettait aux enchères l'an 2000